Si, au cours de ces prochains jours, nous plantons un pommier ou un poirier, observons le tronc. Au collet, juste au dessus des racines, et sous la ramure, nous remarquerons un renflement. C’est à ces endroits que les greffes ont été effectuées.

Chaque arbre fruitier est obtenu par un double greffage. C’est au cours de ce mois de mars que les pépiniéristes poursuivent cette opération dont on ne soupçonne souvent pas la patience qu’elle requiert. Cinq années sont nécessaires pour obtenir un pommier demi-tige ou haute-tige.

Durant la morte saison, un arbrisseau d’un an est tout d’abord planté. Il appartient à une variété sélectionnée pour son aptitude à développer un enracinement déterminé. L’été suivant, un bourgeon est écussonné à son pied, sous l’écorce. Si cette greffe est réussie, le tronc est coupé durant l’hiver suivant au dessus du bourgeon. Le printemps venu, le bourgeon unique bénéficie de toute la sève. Il pousse vigoureusement pour former un tronc. L’année suivante, le tronc poursuit son développement vertical puis les branches latérales qui sont apparues sont supprimées. Quand le printemps revient, quatre ans après le semis ou le marcottage du porte-greffe, le tronc est suffisamment développé pour la greffe.
Première opération : couper le tronc du sujet porte-greffe à la hauteur déterminée par un gabarit. Avec le greffoir, une fente est découpée au sommet du sujet porte-greffe. Le greffon, une portion de rameau d’un an prélevé sur la variété choisie, est ensuite inséré dans la fente de manière à faire coïncider les zones véhiculant la sève, juste sous l’écorce.

Pour qu’ils se soudent, les tissus doivent être maintenus bien en contact. Jadis, on utilisait du raphia pour serrer la greffe. Aujourd’hui, on emploie du ruban adhésif. Vient ensuite le mastic colmatant les vides. Comme le porte-greffe est en pleine sève, les bourgeons du greffon se réveillent rapidement et la greffe est réussie. Des cinq bourgeons du greffon naissent cinq tiges.

Par tailles progressives, elles formeront la ramure de l’arbre qui exprimera les caractéristiques de la variété : le goût et le parfum des fruits, leur époque de maturité, leur faculté de conservation. Tout un patrimoine génétique apporté par seulement cinq bourgeons sur un greffon.